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INVISIBILISER C’EST AUSSI DE LA VIOLENCE

Sang dans la rue, quartier d’Ovejuyo

Nous avons assisté à la radicalisation vertigineuse de postures de la gauche et de la droite pendant cette vingtaine de jours de grèves et de mobilisations en Bolivie, des postures exacerbées par des discours de haine et l’incitation à la violence de la part des dirigeants du MAS, comme de la part de l’opposition. Chacun de ces groupes, avec ses réseaux proches des soi-disant hommes politiques et sympathisants étrangers, ont un agenda défini en amont pour arriver au pouvoir ou pour s’y accrocher. Dans ce jeu, nous citoyens sommes des pions qui bougent dans une direction ou dans une autre, jusqu’au moments où les morts que nous comptabilisons sont les nôtres. Le manque de contrôle social et les abus de ces jours passés ne sont pas dus au fait que la chaise présidentielle est restée vide, mais à l’accomplissement de ces agendas implicites, chacun cherchant à triompher dans une guerre entre deux camps qui ne nous représentent pas. Et nous sommes déjà fatiguées.

Apparemment, l’auto-proclamation de Mme. Jeanine Añez en tant que présidente de la Bolivie a fermé une période d’angoisse, de vide politique, de confusion, d’affrontements et de luttes dans la rue ; mais en réalité c’est une paix de vitrine pour la communauté internationale et pour les instruments de communication de masse. La réalité dans les rues en ce moment est bien autre : c’est une répression, des tortures, des humiliations, des assassinats et de la désinformation. Beaucoup de ces actions violentes sont en train d’être commises par la police et par les forces armées, mais il existe aussi d’autres groupes, apparemment civiles, qui sont armés. Nous ne sommes pas en position de donner une information plus précise sur ceux-ci, mais ce qui est sûr c’est qu’ils sont bien là. Au moment d’écrire ces lignes, les moyens de communication commerciaux ne racontent pas cette histoire, peut-être parce que les politiques ne semblent pas perturber, ils sont pressés de déplorer le déces du colonnel Herbet Antelo, mais pas un mot des autres morts. Invisibiliser c’est aussi de la violence.

C’est pour cela, avec beaucoup de douleur et d’indignation, et sans prétendre être exhaustives que nous avons voulu réaliser un nouveau décompte multimedia des faits qui sont en train d’être documentés par des citoyens de la ville de La Paz. Presque tout le matériel que nous présentons ici a été compilé depuis les réseaux sociaux, d’autres nous ont été envoyés directement par des témoins de ces faits. De plus, nous reproduisons une vidéo publiée dans un moyen de communication pour contextualiser un fait concret.

Dans l’ère des fake-news, nous voulons éviter l’incitation à la curiosité morbide et le sensationnalisme. Nous avons fait des efforts pour vérifier que cette information est fiable, autant que possible, en utilisant des outils comme https://citizenevidence.amnestyusa.org et en lisant les métadonnées dans les archives. Les vidéos sont un type de matériel dont l’authenticité est particulièrement difficile à vérifier (à la différence d’un texte ou d’une image). Nous pensons que c’est de notre responsabilité de vous informer sur la véracité de ces faits qui ont eu lieu les 12 et 13 novembre 2019, tels qu’ils sont détaillés dans la date de création et qu’il ne s’agit pas de matériel modifié (visages changés, chose qui est assez courante sur les vidéos).

INCIDENT OVEJUYO/PEDREGAL

Vidéo 1

Lieu: Quartier Ovejuyo, La Paz
Durée: 00:40
Date de création: 2019: 11: 12
Description: Un voisin montre du sang au sol et raconte qu’il y a eu une fusillade dans le secteur et qu’il y a une autre personne décédée. Cela indique que c’était Cambas déguisé en policiers qui ont tiré et que les voisins ont essayé de dialoguer, mais sans succès.

Vidéo 2

Lieu: Quartier Los Rosales, La Paz
Durée: 04:29
Source: Journal La Razón
Date de publication: 2019: 11: 12
Description: La mère de Beltrán Condori raconte le meurtre de son fils, blessé par balle, et les actes d’intimidation qu’il a subis aux mains de la police, qui a accusé les voisins de porter de la dynamite. Les sœurs et les femmes de Percy Conde sont également interrogés. Il a été retrouvé mort d’une blessure par balle entre des buissons et recouvert d’une couverture, à proximité immédiate du pont dans la région de Pedregal. Les membres de sa famille ont découvert sa mort dans les réseaux sociaux.

Vidéo 3

Cette vidéo peut blesser votre sensibilité

Lieu: Pedregal, selon des témoignages. Signalé sur YouTube comme El Alto
Durée: 00:49
Date de création: NO date de création
Description: Une personne pratiquement inconsciente est allongée sur le sol avec 4 blessures par balle au côté gauche du torse. Les voisins de la place tentent désespérément de l’aider et exigent la présence de la presse. L’événement a lieu dans une rue pendant la journée.

INCIDENT CHASKIPAMPA

Vidéo 4

Lieu: Quartier Chaskipampa, La Paz
Durée: 00:15
Date de création: 2019: 11: 12
Description: Un homme allongé sur le sol, les mains sur la nuque, est attaqué par des personnes en civil. Ils l’insultent, crient, frappent, visent avec une arme à feu et frappent avec un bâton. L’événement se déroule dans une parcelle clôturée, apparemment la cour d’une maison. Au moins deux policiers sont sur les lieux, l’un d’entre eux témoignant des faits.

Vidéo 5

Lieu: Quartier de Chaskipampa, La Paz
Durée: 00:15
Date de création: 2019: 11: 12
Description: Deux personnes ont été jetées sur le trottoir près d’un arbre, frappées avec un bâton et frappées à coups de pied par deux policiers. Il y a un policier qui observe le fait. Un 4ème policier amène une personne de plus qu’ils battent comme les autres.

Audio 6

Lieu: Quartier de Chaskipampa, La Paz
Durée: 00:53
Date: 2019: 11: 13
Description: Témoignage du voisin selon lequel policiers et militaires sont habillés en civil: avec un jean, un t-shirt noir, des gilets pare-balles et des cagoules. Il dit que la veille, ils ont tiré sur des gens du quartier.

Comuniqué

En tant que militante de l’Assemblée permanente des droits humains d’El Alto, j’ai été convoquée par des proches détenus le mercredi 13 novembre 2019 (60 à 70 personnes). Je suis entré dans la FELCC [Force Spéciale de Lutte Contre le Crime] accompagné de quatre parents de La Paz. 20 personnes d’âges différents ont été relâchées. La police a promis de nous fournir la liste des personnes arrêtées et détenues, elle n’a pas tenu ce qui lui avait été promis. Dans la rue, on attend entre 40 et 50 parents (pères, mères, enfants, conjoints, frères et sœurs). J’ai été informé des arrestations suivantes: 4 à 6 mineurs, 6 à 8 femmes – dont une en gestation depuis 5 mois et 3 adultes plus âgés. Le procureur de service était le Dr Larrea. Avec les listes de personnes arrêtées et détenues, nous avons dû corroborer cette information, liste qui ne nous avait pas été fournie. Selon les témoignages des personnes libérées au moment de leur détention, la plupart d’entre elles ont été battues physiquement, sans distinction d’âge ou de sexe. Les attaques physiques constituent une violation des droits humains.

David Inca